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LUC

autour de son jeune corps, de cette nuit d’amour, exalte le triomphe du réveil.

Il chérit, il adore ces deux êtres par qui vient, la fougue juvénile de ses sens, d’être si violemment charmée. L’une a trouvé tout au long de ses membres flexibles la luxure des enlacements ouverts et renoués. L’autre a fait agenouiller devant celui qui le frappa sa légitime colère ; devant celui qui l’humilia, la rigide fierté de son honneur ; il fit plus encore, il enveloppa dans le trouble délicieux d’un baiser le pardon dont ainsi la magnanimité se renforça d’amour !

Luc avait pensé, vêtu en hâte, suivre Julien dans sa retraite et ne pas le laisser dans la solitude désespérée de sa douleur ; mais la crainte d’un bruit dangereux pour Jeannine l’avait retenu. Il ne fallait pas qu’on soupçonnât rien du drame ; Julien lui-même avait pris soin de n’en laisser rejaillir aucun éclat, soucieux de respecter la jeune fille jusqu’à se refuser d’intervenir devant elle, même pour s’opposer à la consommation de sa faute. Certains bruissements dont Luc avait douté, la nuit, lui confirmaient le passage de Julien non loin du tempietto ; il se pouvait donc qu’il eût été témoin de la course brave et follement imprudente de Nine.

Mais Luc s’excusait mal en songeant aux exigences des circonstances, à la crainte d’aggraver des faits dont l’énormité, qui lui avait échappé d’abord, finissait pas l’effrayer ; il s’excusait mal et regrettait son inertie toute semblable, pensait-il, à de la lâcheté ; et cette pensée ravivait ses appréhensions.

Luc s’habilla vite ; il traversa le parc jonché de feuil-