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LUC
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Lucet sortit de l’enveloppe. Une écriture de maçon dans un style de cuisinière signait : Irène de Jolette, une invitation à son thé de cinq heures, rue de Monceau, dans l’hôtel que ce vieil abruti de G*** acheta pour elle. La gaupe coûte douze cent mille francs par an aux caresses gâteuses, et improbables d’ailleurs, du protecteur. Julien raconta l’histoire du bidet en argent niellé d’or, ciselé et reciselé, payé lui seul cinq cents louis avec la robinetterie de vermeil, dont les motifs érotiques copiés au Musée Secret de Naples, amènent l’eau chaude et l’eau froide dans la cuvette…

La quatrième sur fin papier ivoire armorié prie Luc Bruay de faire connaître au comte et à la comtesse Raymond de Païennes s’il accepte de jouer, dans une revue, quelques parties de son propre rôle de Iohanam ; le soin étant abandonné au petit comédien de fixer lui-même son cachet. Le comte et la comtesse l’informaient en outre qu’il devait être, à cette soirée, en compagnie d’artistes de la Comédie-Française, de l’Odéon et de l’Opéra-Comique. Et les salutations d’usage, sous une haute écriture ferme et droite à l’encre violette, se faisaient très aimables pour Luc. Comme un cliché désormais inséparable de son nom « jeune talent, charme, charmant » couraient sous la plume dans chaque lettre…

Julien fit servir le thé dans le salon où ils bavardaient. On alluma de blondes cigarettes de tabac du Levant, et les spirales embaumées s’étiraient paresseusement sur la tête des jeunes hommes.

Ce n’était ni banal ni fatiguant cette audition de lettres curieuses rendues plus attrayantes encore par