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les laissant voir ostensiblement toutes, et, de sa voix douce et irisée comme une perle des Indes contenue en le corail mouillé d’une conque rare, il lut :


« Monsieur,


« J’ignore totalement s’il est convenable qu’un jeune homme fasse à l’un de ses semblables une amoureuse déclaration, même quand cette déclaration se borne à exprimer une émotion très désintéressée. Je ne veux point m’en rapporter aux seuls usages et je récuse traditions et préjugés. La parole est donc au charme que répand autour de soi l’ordonnance parfaite de votre personne et aux sentiments que fait naître, parmi vos auditeurs, ce charme précieux auquel ils ne peuvent se soustraire dès que vous paraissez.

« Savez-vous, Monsieur, — et j’ose à peine vous donner cette qualité banale tant la poésie de votre création vous élève dans un monde étranger au nôtre — savez-vous que votre Iohanam est absolument joli ? J’approcherais de l’inconvenance si je me permettais de développer ce que comporte d’étourdissantes sensations ce seul mot : joli, et de folles suggestions l’éclatante nudité de votre jeune corps. Sachez qu’avant cette soirée délicieuse je n’avais pas la moindre notion de la beauté. Vautré dès le collège dans les horreurs odieusement conseillées aux jeunes hommes, et qu’ils acceptent a comme les ont acceptées leurs papas et tolérées leurs mamans, je croyais, grâce à des complaisances que