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ter ses amies et la société des émigrés. Très souvent seule à la Chablière entre un Père morose, une belle-mère qu’elle n’aimait guère et une sœur qui lui était prise graduellement par les sectaires, elle éprouvait du vide. Ses amies, de leur côté, n’abordaient que peu ce triste séjour et les meilleurs moments étaient ceux où arrivaient les lettres de Charles et de Victor, mais, entre temps Rosalie avait bien du loisir pour savourer sa tristesse.

Comme beaucoup d’autres personnes, elle voyait dans la maladie de l’ennui un signe d’infériorité intellectuelle, et, pour rien au monde, elle n’eût avoué qu’elle en était victime.

Un jour, en lisant un ouvrage du Comte de Ségur, elle tomba sur une phrase qui la ravit d’aise et que vite elle transcrivit dans son cahier vert,


« Les gens d’esprit ne veulent pas convenir qu’ils connaissent l’ennui, mais quand ils en parlent, ils en font des portraits si ressemblans qu’on ne peut douter qu’ils l’aient vu de près ».


— Les gens d’esprit s’ennuient parfois ?