M. de Chaufontaine reconnut la voix de M. de Pappenheim.
— Laissez entrer ! cria-t-il, l’ennemi verra comment sait mourir le maréchal de l’empire d’Allemagne.
Sombres et muets, les cuirassiers s’écartèrent de la porte, et M. de Chaufontaine entra, suivi de M. de Collonges.
Carquefou, Frissonnante à la main, se glissa derrière eux.
M. de Pappenheim, sans cuirasse, la tête nue, couvert déjà des ombres de la mort, gisait sur un lit misérable. Quelques gouttes de sang suintaient à travers l’appareil posé sur les blessures et tombaient à terre. Son épée, brisée par le milieu, était couchée en travers du drap.
À la vue du marquis, il se souleva sur le coude, et, le saluant de la main :
— Il y a loin de la Grande-Fortelle à Leipzig ! dit-il. Depuis lors nous nous sommes rencontrés dans bien des fortunes diverses… Soyez le bienvenu dans ma dernière maison.
M. de Chaufontaine se découvrit ; Carquefou abaissa la pointe de Frissonnante.
Alors, posant la main sur la garde du fer brisé, qu’il n’avait pas abandonné :
— Si c’est là ce que vous cherchez, poursuivit le grand maréchal, attendez encore quelques minutes, la mort va me l’arracher.
Une ombre de colère et de désespoir passa sur son visage.
— Vous m’avez rencontré sur dix champs de bataille, continua-t-il ; par respect pour la mort qui plane ici, oubliez nos longues inimitiés, et répondez en soldat à celui qui fut le Soldat. Votre présence ici me dit assez que la bataille est perdue. Que reste-t-il de l’armée impériale ?