eau d’une fontaine. La bohémienne pressait le pas. Elle bondissait comme un jeune chevreuil au travers de la forêt. Au bout d’un quart d’heure, et sans avoir retourné la tête, elle arriva au camp, et, montant sur un tertre, chercha partout du regard.
— Pourquoi cherchez-vous un cavalier que vous ne connaissez pas ? lui dit Magnus.
— Et que savez-vous si je ne le connais pas ? D’ailleurs, ignorez-vous que j’appartiens à une race qui a le don de seconde vue ?
Un groupe de dragons se tenait sur la lisière du camp. La bohémienne se dirigea rapidement de ce côté et s’approchant d’un cavalier assis sur le tronc d’un bouleau renversé :
— Monsieur de la Guerche, reprit-elle tranquillement, que puis-je faire pour vous ?
Armand-Louis tressaillit. Magnus saisit la bohémienne par le bras.
— Eh ! eh ! dit-il, tu sais des choses qu’il ne fait pas bon de savoir !
La bohémienne ne chercha pas à se dégager de l’étreinte du vieux soldat, et regardant toujours M. de la Guerche.
— S’il ne vous souvient plus de Yerta, reprit-elle, Yerta n’a rien oublié.
— Yerta ! c’est toi la petite Yerta !… s’écria Armand-Louis.
— Moi-même… et si vous avez passé près de moi sans me reconnaître, mes yeux et mon cœur vous ont deviné du premier instant que je vous ai vu !…
— C’est donc pour cela que je voyais toujours en esprit ce regard noir ?… s’écria Magnus, qui lâcha la bohémienne. Mais, si tu savais si bien qui nous sommes, pourquoi ne t’es-tu pas nommée ?
— M. de la Guerche portait un habit et des couleurs qui ne