sentiment du devoir ? Me laissez-vous maîtresse de les diriger à mon gré dans les sentiers qui me paraîtront conduire plus sûrement au but que je veux atteindre ?
— Faites ! Mlle de Pardaillan et Mlle de Souvigny sont à vous.
Mme d’Igomer soupira.
— Que leur bonheur, du moins, me paie des peines qu’elles m’auront coûtées ! dit-elle avec onction.
Cette conversation résumait le sort que la baronne réservait aux deux prisonnières ; mais, avant de recourir aux rigueurs d’un monastère, Mme d’Igomer voulait savoir si elle ne parviendrait pas à ébranler et à séduire ces âmes fières, par les fascinations du luxe et les entraînements du plaisir. Quelle volupté, pour ce cœur dévoré de haine, si sa rivale succombait aux tentations, si, entraînée aux bras de M. de Pappenheim dans le tourbillon éclatant d’une fête, Mlle de Pardaillan trahissait tout ensemble et son amour et sa foi ! Voilà où était la meilleure et la plus douce vengeance. Il fallait corrompre avant de frapper. Mme d’Igomer s’étonna de n’y avoir pas songé plus tôt.
Elle eut soin dès lors de conduire les deux cousines à toutes les fêtes par lesquelles Wallenstein trompait son inaction et entretenait la magnificence de sa Cour. Les robes qu’elles avaient apportées disparurent pour faire place aux plus riches ajustements ; tout ce qui peut éblouir les yeux et captiver la jeunesse leur fut prodigué ; elles respiraient dans une atmosphère de plaisirs ; la musique, la danse, la chasse, les festins, se succédaient sans intervalles, et, autour d’elles, un cercle de gentilshommes brillants faisait entendre un concert d’éloges.
Chaque soir, Adrienne et Diane rentraient chez elles harassées et comme étourdies ; mais rien n’avait prise sur ces âmes vaillantes. Leur simplicité et leur droiture déjouaient