Page:Achard - Droit au but, Lévy frères, 1874.djvu/6

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
2
DROIT AU BUT

ment ce parcours difficile. Des échoppes, des maisons borgnes, des boutiques sombres, des garnis malsains, se disputaient les deux côtés de la rue et lui donnaient un aspect morne et besoigneux. Cependant, au milieu de ces habitations douteuses, que les sergents de ville en promenade sur le trottoir surveillaient volontiers, on rencontrait avec surprise, çà et là, de petits hôtels d’une apparence aimable et qui offraient à leurs locataires la jouissance inespérée de jolis jardins tout remplis de fraîcheur et de lumière. Dans un temps où le luxe de l’espace et des ombrages commençait à disparaître de la grande ville, ces jardins présentaient des avantages qui compensaient l’éloignement et le difficile accès de ce quartier.

À l’époque où commence ce récit, un de ces hôtels, mais non pas l’un des plus grands, était loué par un bail à long terme à une famille modeste qui se composait de deux personnes seulement, la mère et la fille.

La mère pouvait avoir une cinquantaine d’années, la fille vingt à peu près. On ne connaissait pas de fortune à madame Van der Flit, sa fille passait donc pour n’avoir point de dot à espérer, et ce qu’on en savait permettait aux bonnes femmes du voisinage de s’étonner de la constante élégance de mademoiselle Mina, qu’on voyait toujours tirée à quatre épingles. Cependant, et malgré cette élégance, on n’élevait aucun soupçon sur la bonne conduite et la sévère honnêteté de cette jeune personne. L’hôtel qui portait le nu-