cœur réprouve ; mais, Claudine, il y a la réclusion éternelle ; non pas cet emprisonnement doux et facile qui laisse voir le ciel et respirer la lumière, mais la réclusion au fond d’une cellule, le cloître sans l’espérance. On me donnera six pieds de terre entre quatre murs, on comptera sur les lassitudes et les mortelles influences de l’isolement, sur les lâches conseils du désespoir, et, quoi qu’il arrive, religieuse ou recluse, je suis perdue pour lui.
– Non, tu ne seras pas perdue pour lui ! s’écria Claudine, qui pleurait en embrassant Suzanne. Nous avons trois jours devant nous, trois jours, entends-tu ? Si l’on veut t’enfermer, je m’enferme avec toi, et crois bien que Cornélius démolira le couvent plutôt que de m’y laisser !
– Oui, reprit Suzanne, Jacques, ton frère, et Cornélius, ton fiancé, sont deux nobles cœurs, mais ils ont contre eux le ministre.
– Ils ont pour eux l’amour ; l’un vaut bien l’autre, qu’en penses-tu ?
La cloche du couvent sonna l’Angélus ; on entendit les chants religieux des sœurs qui se rendaient à la chapelle, et les deux amies se séparèrent. Une heure après cet entretien, Cornélius, qui rôdait sans cesse autour du couvent pour en mieux connaître les êtres, heurta un gentilhomme qui entrait dans la rue de Vaugirard par la rue Cassette. Le choc fit tomber les chapeaux des deux jeunes gens.
– Eh ! morbleu, l’homme au manteau ! s’écria l’un d’eux, vous allez bien vite ! souffrez qu’on vous arrête.
Et il mit la main sur la garde de son épée.
Mais le fer à demi tiré rentra dans le fourreau, et le gentilhomme tendit sa main à Cornélius en éclatant de rire.
– Sur ma parole, j’allais faire une sottise ! Mais que diable aussi, monsieur, on prévient les gens quand on va de Douvres à Paris.