avec ses pouces. Le sergent s’arrêta devant cette honnête figure tout à la fois placide et résolue.
– Mon ami, lui dit-il en lui prenant la main, ce que tu veux faire là est de la folie.
– Pas plus que ce que vous ne voulez pas faire.
– Tu es donc tout à fait décidé ?
– Parfaitement. J’étais piqueur, je suis caporal, je serai mort, voilà tout.
– Mais, en supposant que j’accepte, as-tu réfléchi aux difficultés de ton projet ?
– Dame ! si on pensait à tout, on ne tenterait jamais rien !
– Il y a la sentinelle du chemin de ronde.
– C’est un risque à courir.
– Les patrouilles qui vont et viennent autour des remparts.
– C’est leur métier de voir les gens, ce sera le nôtre de les éviter.
– On nous rattrapera avant que nous ayons gagné la frontière.
– À la grâce de Dieu !
Belle-Rose frappa du pied. Le caporal continuait à faire tourner ses pouces.
– Après tout, fais ce que tu voudras ! s’écria le sergent ; si tu es fusillé, ce sera ta faute.
– C’est convenu, dit la Déroute, et il se leva.
Le jour finissait et l’heure du dîner était venue. Le caporal sortit pour remplir les devoirs de sa charge. Il avait à veiller à la fois sur la gamelle et sur son prisonnier. À peine eut-il passé la porte, que Belle-Rose, tirant un crayon de sa poche, écrivit à la hâte quelques mots sur un bout de papier. Quand il eut fini, il s’approcha de la fenêtre grillée qui donnait sur le préau ; un sapeur était auprès.
– Veux-tu me rendre un service, camarade ? lui dit Belle-Rose.
– Si la consigne me le permet, volontiers.