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Où s’était jusqu’alors abrité leur berceau.
Ils sont enfin sauvés ; dans ses bras tutélaires
L’arbre voisin les a reçus.
Mais ils frappaient les airs de leurs plaintes amères,
Sans savoir si leurs vœux pouvaient être entendus.
Les castors cependant ont fini leur ouvrage.
Le sapin scié par leurs dents,
Craque, tombe ; et soudain de longs gémissements,
Des cris affreux sont partis du rivage.
C’est qu’en un coin de l’univers
Veille une éternelle puissance,
Dont les tyrans et les pervers,
Dans une heureuse imprévoyance,
Ne soupçonnent jamais l’invisible présence.
Un vent fougueux, inattendu,
Sur le sapin branlant tombé comme un orage,
L’avait jeté sur le village
Des inhumains qui l’avaient abattu.
Ils n’avaient rien sauvé de cette immense perte.
Cabanes et greniers, tout était saccagé.
De morts et de blessés la plage était couverte.
Et l’écureuil était vengé.