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Leur aveuglait les yeux, leur inondait la face :
Mais ce troupeau de jeunes fous
Ne perdait l’espoir ni l’audace.
Sur une seule ligne ils se rangèrent tous,
S’avancèrent de front bras dessus, bras dessous ;
Criant au vent : Recule ; et, refoulés en masse,
Rappelés sous leurs toits par la nuit et la faim,
Lui firent encor la menace
De revenir le lendemain.
Ils vinrent en effet, et tous ceux du village.
Mais la tempête avait cessé :
Le vent ne soufflait plus et n’avait pas laissé
Un vestige de son passage.
La vogue d’une opinion.
D’un livre, d’un auteur, d’un héros de tribune
Ont parfois la même fortune
Que ce vent du septentrion.
L’arrêter dans son cours serait chose insensée ;
Mais quand cette vogue est passée
On se demande bien souvent
Ce qu’était ce héros, cet auteur, cet ouvrage,
Qui faisaient un si grand tapage.
Ce qu’ils étaient ? Ce qu’est le vent.