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s’en rendre adjudicataire pour une somme de 13,500 francs qu’il n’avait pas, qu’il dut chercher : sur ces entrefaites, un spéculateur lui offre 25,000 francs pour lui racheter le château : fi donc ! Mais la somme nécessaire, indispensable, dont il est en peine, il la trouve enfin ; il la dépasse aussitôt, il fait faire dans le bâtiment les réparations et appropriations convenables, en vue d’y établir un pensionnat, un orphelinat et un ouvroir pour les jeunes filles, trop exposées dans les fabriques horlogères et autres dont le pays est couvert. Voilà, Messieurs, le plus beau titre, l’œuvre maîtresse, pour ainsi dire, de ce brave prêtre qui est de ceux qui parlent peu et qui agissent beaucoup. L’établissement de Blamont, cédé et abandonné par lui aux religieuses appelées filles de la Retraite chrétienne, aux conditions, est-il besoin de le dire ? les plus gratuites et les plus généreuses, est aujourd’hui en exercice et a commencé de fonctionner. — Dans le Mémoire détaillé que j’ai sous les yeux, on évalue à près de 133,000 francs ce qu’ont pu coûter toutes les fondations réunies, dues au zèle et à l’initiative de l’abbé Brandelet, et il n’y a pas contribué de sa bourse pour moins de 30,000 fr. Aussi, après avoir vendu pièce à pièce son bien patrimonial, est-il resté endetté d’un tiers de la somme, dont il sert les intérêts. Écoutons un témoin fidèle, l’institutrice de l’endroit, dans son langage le plus simple : « Quoique ne se plaignant jamais, M. l’abbé s’est trouvé souvent dans le besoin ; je lui ai, de mes épargnes, acheté par trois fois une soutane, et je connais un monsieur qui lui a acheté souliers et chapeau. Je sais aussi de sa domestique, qui le sert depuis quarante ans, qu’elle lui a donné tous ses gages pour l’aider dans une heure de détresse au sujet d’un payement. » Voilà