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avait seul osé intervenir pour défendre son collègue, Napoléon lui dit à son grand lever : « Je crains, Monsieur le préfet, que vous n’ayez pas une juste idée des devoirs d’un conseiller d’État. — En cela comme en toutes choses. Sire, je crois qu’on ne risque guère de se tromper quand on n’écoute que sa conscience. » L’empereur ne répondit pas et n’en reparla jamais.

Je ne veux pas laisser cette partie de la carrière de M. Pasquier sans vous dire que, pendant sa durée et au milieu d’immenses travaux, il sut se ménager deux précieuses distractions qui ne lui ont jamais manqué : il resta fidèle aux élégantes et spirituelles réunions qu’il aimait tant et où il était si bien placé, et il porta le plus vif intérêt aux publications qui honorèrent la littérature à cette époque. Voici la lettre que lui écrivait M. de Beausset en lui envoyant un exemplaire de sa belle histoire de Bossuet :

« Voilà, Monsieur, cette histoire de Bossuet, qui est autant votre ouvrage que le mien. Si vous prenez la peine de la relire, il vous sera facile de remarquer combien j’ai profité de vos bonnes et utiles observait tions, et tous les droits que vous avez à ma juste reconnaissance. Croyez aussi que j’en suis pénétré jusqu’au fond du cœur, et qu’il m’est bien doux d’avoir dû mes premiers rapports avec vous aux sages et utiles conseils que j’ai reçus de votre intérêt et de votre bonté pour moi. . . . . . . . . . »

Nous touchons, Messieurs, à l’un de ces moments d’épreuves qui font le tourment de tout homme public, qu’il soit agité par le sentiment de l’intérêt ou par le sentiment du devoir. Cette dernière et noble inquiétude était la seule,