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discours de réception.

lui seul. Son dévouement ne lui fut pas fatal. Fouché, ministre de la police, avait pour bibliothécaire un oratorien comme lui, le P. Oudet, ancien ami du président Nodier. Le P. Oudet s’empressa de prendre la défense du poëte, qu’il peignit au ministre comme un jeune homme de talent, plus étourdi que dangereux. Tout se borna à une réprimande, avec injonction de partir sur-le-champ. Déjà le président, effrayé, rappelait avec instances son fils auprès de lui. Le jeune satirique quitta Paris le désespoir dans le cœur. Il avait rêvé la palme du martyre, et n’obtenait que l’humiliation d’une dédaigneuse clémence. En ne le fusillant point, on enlevait à son roman un dénoûment magnifique.

Reçu à Besançon avec, enthousiasme, par les royalistes que l’exil n’avait pas dégoûtés de projets chimériques, et par les républicains frémissant sous un joug nouveau, il continua, avec plus d’imprudence que jamais, des relations que se disputaient les deux camps, naguère ennemis. Je crois qu’il s’affilia vers cette époque à une société secrète, je veux dire, surveillée d’un peu loin par l’active police du consulat. Il conspira, théoriquement surtout, cherchant plutôt les émotions d’une entreprise hasardeuse, que ses résultats politiques. Le moment était mal choisi, car, parmi les associés de Charles Nodier, il y avait quelques hommes dont les projets trop sérieux pouvaient provoquer et justifier les rigueurs du gouvernement. Un soir, alarmé de l’arrestation imprévue d’un de ses amis, il crut n’avoir que le choix entre la fuite et les cachots de la citadelle. Leste et plein d’adresse, il escalada les remparts et se sauva dans la campagne. Il racontait que son trouble l’avait empêché de se