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CHAPITRE XVIII.

De la Perſpective.



QUelque Auteur a dit, que Perſpective & Peinture étoient la même choſe, parce qu’il n’y avoit point de Peinture ſans Perſpective. Quoy que la propoſition ſoit fauſſe, abſolument parlant, d’autant que le corps qui ne peut être ſans ombre, n’eſt pas pour cela la même choſe que l’ombre ; néanmoins elle eſt véritable dans ce ſens, que le Peintre ne peut ſe paſſer de Perſpective dans toutes ſes opérations, & qu’il ne tire pas une Ligne, & ne donne pas un coup de Pinceau qu’elle n’y ait part, du moins habituellement. Elle régle la meſure des formes & la dégradation des Couleurs en quelque lieu du Tableau qu’elles ſe rencontrent. Le Peintre eſt forcé d’en connoître la néceſſité, & quoy qu’il en ait, comme il doit, une habitude conſommée, il s’expoſera ſouvent à faire de grandes fautes contre cette ſience, s’il eſt pareſſeux de la conſulter de nouveau, du moins dans les endroits plus viſibles, & de prendre la Régle & le Compas pour ne rien hazarder, & ne point s’expoſer à la cenſure.