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ſelon le caractére de ſes Figures. Les Peintres, qui n’ont point connu la liberté qu’ils avoient en cela, ſe ſont faits autant de tort, en ſuivant les Sculptures Antiques, que les Sculpteurs en voulant ſuivre les Peintres.

La raiſon pour laquelle les plis doivent marquer le nud, c’eſt que la Peinture eſt une ſuperficie plate, qu’il faut anéantir en trompant les yeux, & en ne laiſſant rien d’équivoque. Le Peintre eſt donc obligé de garder cet ordre dans toutes ſes Draperies, de quelque nature qu’elles puiſſent être, fines, ou groſſes, travaillées, ou ſimples ; mais qu’il préfére ſur tout la majeſté des plis à la richeſſe des étofes, qui ne conviennent que dans les Hiſtoires dans leſquelles elle a été, ou pourroit être vrai-ſemblablement employée ſelon les tems & les coûtumes.

Comme le Peintre doit éviter la dureté & la roideur dans les plis, & empêcher qu’ils ne ſentent, comme on dit, le manequin, il doit de même uſer avec prudence des Draperies volantes. Car elles ne peuvent être agitées que par le vent dans un lieu où l’on peut raiſonnablement ſuppoſer qu’il ſouffle ; ou par la compreſſion de l’air, quand la Figure eſt ſuppoſée en mouvement. Ces ſortes