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de faire mal ce que l’on entreprend. Si un Peintre ayant à traiter un ſujet hiſtorique, ignore les objets qui doivent entrer dans ſa Compoſition pour la rendre fidéle, il doit ſoigneuſement s’en inſtruire, ou par les Livres, ou par le moyen des Sçavans ; & l’on ne peut nier que la négligence qu’il apportera en cela ne ſoit inéxcuſable. J’en éxcepte néanmoins ceux qui ont peins des ſujets de dévotion, où ils ont introduits des Saints de différens tems & de différens païs, non pas de leur chois, mais par une complaiſance forcée pour les perſonnes qui les faiſoient travailler, & dont la trop grande ſimplicité ne leur permettoit pas de faire réflexion ſur les choſes acceſſoires qui peuvent contribuer à l’ornement de la Peinture.

L’Invention, qui eſt une partie eſſentielle de cet Art, conſiſte ſeulement à trouver les objets qui doivent entrer dans un Tableau, ſelon que le Peintre ſe l’imagine, faux ou vrais, fabuleux ou hiſtoriques. Et ſi un Peintre s’imaginant qu’Aléxandre fût vêtu comme nous le ſommes aujourd’huy, & qu’il repréſentât ce Conquérant avec un Chapeau & une Perruque comme font les Comédiens, il feroit ſans doute une choſe trés-ridicule, & une faute trés-