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les achétent au poids de l’or, & que ces Ouvrages ſont du nombre de ceux qui tiennent le premier rang dans leurs Cabinets.

Il eſt ſans doute que ſi cette Eſſence dans les Tableaux des Peintres Vénitiens avoit été accompagnée des ornemens qui en relévent le prix, je veux dire de la fidélité de l’Hiſtoire & de la Chronologie, ils en ſeroient beaucoup plus eſtimables : mais il eſt certain auſſi que ce n’eſt que par cette Eſſence que les Peintres doivent nous inſtruire, & que nous devons chercher dans leurs Tableaux l’imitation de la Nature préférablement à toutes choſes. S’ils nous inſtruiſſent, à la bonne heure, s’ils ne le font pas, nous aurons toûjours le plaiſir d’y voir une eſpece de création qui nous divertit, & qui met nos paſſions en mouvement.

Que ſi je veux apprendre l’Hiſtoire, ce n’eſt point un Peintre que je conſulteray, il n’eſt Hiſtorien que par accident ; mais je liray les Livres qui en traitent expreſſément, & dont l’obligation eſſentielle n’eſt pas ſeulement de raconter les faits, mais de les raconter fidélement.

Cependant on ne prétend pas icy excuſer un Peintre en ce qu’il eſt mauvais Hiſtorien, car l’on eſt toûjours blâmable