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ni voir, ni étudier toutes les choſes qui ſeroient à ſouhaiter pour la perfection de ſon Art, il eſt bon qu’il ſe ſerve ſans ſcrupule des études d’autruy.




CHAPITRE II.

Qu’il eſt bon de ſe ſervir des études d’autruy ſans aucun ſcrupule.



IL n’eſt pas poſſible de bien répréſenter les objets, non ſeulement qu’on n’a point vûs, mais qu’on n’a point deſſinez. Si un Peintre n’a point vû de Lion, il ne ſçauroit peindre un Lion ; & s’il en a vû, il ne peut répréſenter cet animal qu’imparfaitement à moins qu’il ne l’ait deſſiné ou peint d’après Nature, ou d’aprés l’Ouvrage d’un autre.

Sur ce pied on ne doit pas blâmer un Peintre, qui n’ayant jamais vû ni étudié l’objet qu’il a à repréſenter, ſe ſert des études d’un autre, plutôt que de faire de ſon caprice quelque choſe de faux : il eſt néceſſaire enfin qu’il ait ſes études, ou dans ſa mémoire, ou dans ſon porte-feüille ; les ſiennes, dis-je, ou celles d’autruy.

Aprés que le Peintre a rempli ſon eſprit