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il fut à Rome de le demander au Pape, qui le luy accorda fort gracieuſement. Sa Sainteté fit auſſi-tôt écrire à Octavien de Médicis, qu’il fit encaiſſer le Tableau, & qu’il l’envoyât à Mantouë. Octavien, qui étoit un grand Amateur de Peinture, & qui ne vouloit pas priver Florence d’une ſi belle choſe, trouva moyen d’en différer l’envoy, ſous prétexte de faire faire au Tableau une bordure plus riche. Ce délay donna le tems à Octavien de faire copier le Tableau par André del Sarte, qui en imita juſqu’aux petites taches qui étoient deſſus. Cet Ouvrage en effet étoit ſi conforme à ſon Original, qu’Octavien luy-même avoit de la peine à les diſtinguer, & que pour ne s’y pas tromper, il mit une marque derrière la Copie, & l’envoya à Mantouë quelques jours aprés. Le Duc la reçut avec toute la ſatisfaction poſſible, ne doutant point que ce ne fût l’Ouvrage de Raphaël non plus que Jules Romain, qui étoit auprès de ce Prince, & qui ſeroit demeuré toute ſa vie dans cette opinion, ſi Vaſari, qui avoit vû faire la Copie, ne l’avoit déſabuſé. Car celuy-cy étant arrivé à Mantouë, fut tres bien reçû de Jules Romain, qui, aprés luy avoir montré toutes les curioſitez de ce Duc, luy dit qu’il leur reſtoit encore à voir la plus belle choſe qui fût