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la sphère accessible pour nous, le transportant dans une conscience plus élevée, elle n’explique pas le caractère social de ces faits de notre conscience, que nous apercevons comme étant sociaux ; à côté des « phénomènes » métaphysiques supposés (pour nous exprimer rigoureusement d’après l’esprit de l’hypothèse présente), restent intacts, retranchés hors de son domaine, les phénomènes sociaux propres, les données de notre expérience. Ayant imaginé de la manière la plus complète un certain monde hypothétique, existant hors de notre pensée, nous ne nous approcherons point cependant pour cela d’un seul pas de la compréhension de ce qui ne s’impose à notre intuition, ne s’implante dans notre vie, qu’en raison de sa manifestation dans la pensée[1].

V

Avant donc que nous essayions d’élucider la nature des phénomènes sociaux et ce caractère objectif et psychique qui les distingue de tous les autres et fait supposer en même temps, qu’il recèle

  1. On pourrait considérer « la conscience sociale » comme une nouvelle édition de l’absolu de Schelling, qui, coagissant indissolublement avec les « volontés individuelles » produit l’histoire de l’humanité, unit la liberté subjective avec la nécessité objective. Cet absolu, c’est « le principe supérieur à la fois au sujet et à l’objet, qui ne peut être ni l’un ni l’autre et qui cependant constitue leur unité ». C’est « la substance inaccessible dont les intelligences ne sont que des puissances ou des fonctions ». — « L’histoire, dit Schelling, est l’évolution de ce principe, l’absolu, qui s’exprime plus ou moins dans toutes les actions, et par là établit entre elles un enchaînement et une harmonie, leur donne la régularité et la loi, et compose avec elles, sans qu’elles cessent d’être libres, un poème ou un drame magnifique. Tout en se manifestant dans toute l’étendue et à travers toute la durée, l’absolu ne peut, ni dans aucun lieu ni dans aucun temps, s’exprimer et se réaliser entièrement. S’il le faisait, rien n’existerait que lui ; les individus, la liberté cesseraient d’être. Néanmoins il ne se révèle qu’à travers le libre jeu des volontés individuelles ; si ces volontés n’étaient pas libres, il ne pourrait exister ; elles sont donc, en quelque façon, ses collaboratrices. Et ainsi la conséquence de l’action de l’absolu par l’intermédiaire des êtres intelligents, c’est que les actes de ceux-ci, qui constituent l’histoire, ne sont ni exclusivement libres ni exclusivement nécessaires, mais à la fois nécessaires et libres. »