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Ce n’est pas de l’huile d’olive qu’on fabrique à Marseille : ôtez-vous ce préjugé de l’esprit. L’huile d’olive se fait à la campagne, petitement, dans la mesure des récoltes, toujours modestes ; c’est presque une industrie domestique. Les moulins de la ville, qui tournent vingt-quatre heures par jour, écraseraient en un moment toutes les olives de la Provence. C’est une viande trop creuse à mettre sous leur dent : apportez-leur des navires chargés de sésame, d’arachides ou de noix de coco ; voilà le régime qui leur convient.

Sésame, ouvre-toi ! c’est le mot d’Aladin dans le conte des Mille et une Nuits. À cette phrase magique, la cave aux trésors s’ouvre toute grande. Qui nous l’eût dit, quand nous étions enfants, que le sésame, en dehors de toute féerie, renfermait d’inépuisables trésors ? C’est une petite graine de l’Inde, plate, allongée, noirâtre ; j’en ai vu de belles montagnes dans les magasins de Marseille. On le fait passer au laminoir. Sésame, ouvre-toi ! Il en sort une huile blanche, limpide, excellente à manger. On le porte ensuite sous des meules énormes en granit d’Écosse : Sésame, ouvre-toi ! On le soumet à l’action de machines hydrauliques qui brisent une colonne d’acier comme un enfant casse un joujou : Sésame, ouvre-toi ! On l’écrase à chaud ; on en tire de l’huile pour la savonnerie, de l’huile pour l’éclairage, et lorsqu’on l’a épuisé jusqu’à la dernière goutte, il reste un tourteau, une galette qui sert encore à engraisser les champs.

Le sésame d’Aladin est appelé aux plus hautes destinées. Il détrônera les arachides, les colzas, les pavots, les faînes, les noix et même les olives, lorsque le fret des navires de l’Inde coûtera un peu moins cher. Petite graine deviendra grande dès qu’on aura percé l’isthme de Suez.