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Il y a dans ce moment à Rome une jeune paysanne du royaume de Naples que tous les artistes connaissent sous le nom de Stella. Le public de Paris, sans l’avoir jamais vue, connaît bien sa figure et son costume, car elle a posé pour plus d’un peintre français. Stella est très-jolie et très-sage ; elle circule impunément dans tous les ateliers sans autre chaperon que sa petite sœur Gaetana. Ces deux enfants (l’aînée a dix-huit ans, la cadette neuf ou dix) gagnent ensemble une douzaine de francs par jour à faire le métier de modèle. Elles posent la tête et le costume. C’est un travail très-pénible, surtout dans les premiers temps. L’immobilité absolue du corps dans une attitude commandée devient accablante au bout d’une demi-heure, et j’ai vu des modèles inexpérimentés tomber comme une masse inerte au milieu de la séance.

Stella, je vous l’ai dit, est d’une sagesse irréprochable. Cette jeune fille, qui ne sait pas lire, qui n’a reçu aucune éducation morale, qui vit tout le jour au milieu des garçons et qui entend les conversations les plus variées, n’a jamais donné prise à la critique. Elle fait son métier en conscience, amassant écu sur écu, jusqu’au jour où elle sera assez riche pour acheter dans son village une maison et un mari. Ces montagnards du midi sont les Auvergnats de l’Italie.

Malheureusement le village de Stella est en puissance de curé. Le curé a peur que Stella ne se perde à Rome ; il en écrit à l’évêque de la province, qui écrit au prélat chargé de la police pontificale. Ordre à Stella de déguerpir ou de se marier. Les peintres poussent les hauts cris, on fait agir de hautes influences ; on obtient un mois de répit. Mais le curé, l’évêque et la police reviennent à la charge. On trouve un mari pour Stella. C’est un butor