l’oncle et le neveu,\t75 aurait été fort en peine si le hasard delà naissance l’eût affligé d'un nom remarquable. Si, pour l’achever, son parrain l’eût appelé Améric ou Fernand, il n’au¬ rait signé de sa vie. Heureusement ses noms étaient aussi modestes que s’il les eût choisis lui-même. Sa timidité l’empêcha de prendre une carrière. Après avoir franchi le seuil du baccalauréat, il s’a- i dos sa à cette grande porte qui conduit à tout, et il resta en contemplation devant les sept ou huit che¬ mins qui lui étaient ouverts. Le barreau lui semblait trop bruyant, la médecine trop remuante, l’enseigne¬ ment trop imposant, le commerce trop compliqué, l’administration trop assujettissante. Quant à 1 ’armée, il n’y fallait pas songer : ce n’est pas qu’il eût peur de l’en¬ nemi; mais il tremblait à l’idée de l’uniforme. Il s’en tint donc à son premier métier, non comme au plus fa¬ cile, mais comme au plus obscur : il vécut de ses rentes. lomme il n’avait pas gagné son argent mi-même, i) le prêtait volontiers. En retour d’une vertu si rare, le ciel lui donna beaucoup d’amis. Il les aimait tous sincèrement, et faisait leurs volontés de très-bonne grâce. Lorsqu’il en rencontrait un sur le boulevard, c’était toujours lui qui se laissait prendre le bras, faisait un demi-tour sur lui-même, et cheminait où l’on voulait le conduire. Notez qu’il n’était ni sot, ni borné, ni ignorant. Il savait trois ou quatre langues vivantes; il possédait le latin, le grec et tout ce qu’on apprend an collège; il avait quelques notions de com-
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