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J\t164\tLE BUSTE. !\tbeauté d'une fille, il est prudent de regarder le por¬ trait de sa mère. Cette enfant, fort séduisante par le dehors, est pour¬ vue d’une âme inexplicable. Elle parle rarement, peut- être parce qu’on ne la questionne jamais. Son père n’a pas le temps de causer avec elle, et Mme Michaud, qui cause avec tout le monde, se fait toujours la part du lion. Les hommes qui viennent au château sont trop de leur siècle pour s’amuser à déchiffrer l’esprit d’une petite fille. Enfin, elle n’a pas d’amies de pen¬ sion, n’ayant jamais été mise en pension. On la croit un peu sotte parce qu’elle a contracté l’habitude du silence ; mais son cœur chante en dedans. Une eune fille qui se tait est comme une volière dont les portes sont fermées. Approchez-vous tout près, vous n’en¬ tendez rien. Appliquez votre oreille à la porte : pas un h murmure. Ouvrez í il s’élève un concert de gazouille¬ ments frais et sonores qui remplit les airs et monte jusqu’au ciel. Lorsque Victorine s’en allait dans le parc, un livre à la main, sous l’escorte de sa femme de chambre ou du vieux Perrochon, Mme Michaud di¬ sait en la suivant des yeux :\tPauvre petite ! elle ne dit rien, mais je veux que le loup me croque si elle en pense davantage. » Mme Michaud ne soupçonnait pas que sa nièce, à force de lire dans les livres et en elle- même, se substituait à l’héroïne de tous ses romans, et qu’elle avait déjà couru plus d’aventures que la belle Angélique et Mme de Longueville. a