Page:About - Les mariages de Paris, 1856.djvu/13

Cette page n’a pas encore été corrigée

LES JUMEAUX DE L HÔTEL CORNEILLE,\t7 ques sous par semaine, le produit d’une loterie an¬ nuelle et les vieux habits de l’école, composent un modeste fonds où l’on prend tous les jours sans jamais l’épuiser. On distribue dans le quartier quelques car¬ tons imprimés qui représentent du bois, du pain ou du bouillon, quelques vêtements, un peu de linge et beaucoup de bonnes paroles. La grande utilité de cette petite institution est de rappeler aux jeunes gens que la misère existe. Mathieu m’accompagnait plus souvent que Léonce dans les escaliers tortueux du 12e arrondissement. Léonce disait : « La misère est un problème dont je veux trouver la solution. Je pren¬ drai mon courage à deux mains, je surmonterai tous mes dégoûts, je pénétrerai jusqu’au fond de ces mai¬ sons maudites où le soleil et le pain n’entrent pas tous les jours; je toucherai du doigt cet ulcère qui ronge notre société, et qui l’a mise, tout dernière¬ ment encore, à deux doigts du tombeau ; je saurai dans quelle proportion le vice et la fatalité tra¬ vaillent à la dégradation de notre espèce. » Il disait d’excellentes choses, mais c’était Mathieu qui venait avec moi.\t. Il me suivit un jour, rue Traversine, chez un pau¬ vre diable dont le nom ne me revient pas. Je me rap¬ pelle seulement qu’on l’avait surnommé le Petit-Gris, parce qu’il était petit et que ses cheveux étaient gris. 11 avait une femme et point d’enfants, et il rempaillait des chaises. Nous lui fîmes notre première visite au