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bornes. Moi, je n’ai jamais pu lui pardonner ses robes qui se fourrent obstinément sous les pieds de ma chaise, l’odeur de patchouli qu’elle répand autour de moi, et les regards pâmés qu’elle promène autour de la table. On dirait, sur ma parole, qu’elle n’est pas capable de regarder une carafe sans lui faire les yeux doux. Mais si vous l’aimez telle qu’elle est, il n’y a rien à dire. Elle partit à neuf heures pour sa pension ; je lui souhaitai un bon voyage. Dix minutes après, je serre la main de nos amis, nous prenons rendez-vous pour le lendemain, je sors, je réveille mon cocher, et devinez un peu qui je trouve dans la voiture ? Crinolina invariabilis avec la servante du pâtissier.

« Elle appuie un doigt sur sa bouche, je monte sans rien dire, et nous partons. « Monsieur Harris, me dit-elle en assez bon anglais, ma foi ! monsieur Harris, jurez-moi de renoncer à vos projets contre le Roi des montagnes. »

« Je me mets à rire, elle se met à pleurer. Elle jure que je me ferai tuer ; je réponds que c’est moi qui tue les autres ; elle s’oppose à ce qu’on tue Hadgi-Stavros, je veux savoir pourquoi, et enfin, à bout d’éloquence, elle s’écrie, comme au cinquième acte d’un drame : « C’est mon père ! » Là-dessus, je commence à réfléchir sérieusement : une fois n’est pas coutume. Je songe qu’il me serait possible de récupérer un ami perdu sans en risquer deux ou trois autres, et je dis à la jeune Pallicare :

« Votre père vous aime-t-il ?

« — Plus que sa vie.

« Vous a-t-il jamais refusé quelque chose ?