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de rappeler à la vie le pauvre Roi des montagnes. Il souffrait cruellement ; il se plaignait d’une soif ardente et d’une vive douleur dans l’épigastre. Ses mains et ses pieds glacés se contractaient avec violence. Le pouls était rare, la respiration haletante. Son estomac semblait lutter contre un bourreau intérieur sans parvenir à l’expulser. Cependant son esprit n’avait rien perdu de sa vivacité et de sa présence ; son regard vif et pénétrant cherchait à l’horizon la rade de Salamine et la prison flottante de Photini.

Il me dit, en crispant sa main autour de la mienne : « Guérissez-moi, mon cher enfant ! Vous êtes docteur, vous devez me guérir. Je ne vous reproche pas ce que vous m’avez fait ; vous étiez dans votre droit ; vous aviez raison de me tuer, car je jure que, sans votre ami Harris, je ne vous aurais pas manqué ! N’y a-t-il rien pour éteindre le feu qui me brûle ? Je ne tiens pas à la vie, allez ; j’ai bien assez vécu ; mais, si je meurs, ils vous tueront, et ma pauvre Photini sera égorgée. Je souffre. Tâtez mes mains ; il me semble qu’elles ne sont déjà plus à moi. Mais croyez-vous que cet Américain ait le cœur d’exécuter ses menaces ? Qu’est-ce que vous me disiez tout à l’heure ? Photini l’aime ! La malheureuse ! Je l’avais élevée pour devenir la femme d’un roi. J’aimerais mieux la voir morte que… Non, j’en suis bien aise, après tout, qu’elle ait de l’amour pour ce jeune homme ; il aura pitié d’elle, peut-être. Qu’êtes-vous pour lui ? un ami, rien de plus : vous n’êtes même pas son compatriote. On a des amis tant qu’on veut ; on ne trouve pas deux femmes comme Photini. Moi, j’étranglerais bien tous mes amis si j’y trouvais mon compte ; mais jamais je ne tuerais une