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voyage. Mais bientôt il fallut changer de note. Le cuir chevelu, irrité par une multitude de lésions imperceptibles, s’enflamma. Une démangeaison sourde, puis un peu plus vive, puis intolérable, courut autour de ma tête. Je voulus y porter les mains ; je compris dans quelle intention l’infâme m’avait fait garrotter. L’impatience accrut le mal ; tout mon sang se porta vers la tête. Chaque fois que la main de Sophoclis s’approchait de ma chevelure, un frémissement douloureux se répandait dans tout le corps. Mille démangeaisons inexplicables tourmentaient mes bras et mes jambes. Le système nerveux, exaspéré sur tous les points, m’enveloppait d’un réseau plus douloureux que la tunique de Déjanire. Je me roulais par terre, je criais, je demandais grâce, je regrettais les coups de bâton sur la plante des pieds. Le bourreau n’eut pitié de moi que lorsqu’il fut au bout de ses forces. Lorsqu’il sentit ses yeux troubles, sa tête pesante et son bras fatigué, il fit un dernier effort, plongea la main dans mes cheveux, les saisit à poignée, et se laissa retomber sur son chevet en m’arrachant un cri de désespoir.

« Viens avec moi, dit Moustakas. Tu décideras, au coin du feu, si je vaux Sophoclis, et si je mérite une lieutenance. »

Il m’enleva comme une plume et me porta dans le camp, devant un monceau de bois résineux et de broussailles entassées. Il détacha les cordes, me dépouilla de mes habits et de ma chemise, et me laissa sans autre vêtement qu’un pantalon. « Tu seras, dit-il, mon aide de cuisine. Nous allons faire du feu et préparer ensemble le dîner du Roi. »

Il alluma le bûcher et m’étendit sur le dos, à