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ensemble par les cordons et je les pendis aux courroies de ma boîte. Enfin, après avoir songé à tout, jeté un dernier coup d’œil à mes travaux de terrassement, évoqué les souvenirs de la maison paternelle et envoyé un baiser dans la direction d’Athènes et de Mary-Ann, j’allongeai une jambe par-dessus le parapet je pris à deux mains un arbuste qui pendait sur l’abîme, et je me mis en voyage à la garde de Dieu.

C’était une rude besogne, plus rude que je ne l’avais supposé de là-haut. La roche mal essuyée me procurait une sensation de froid humide, comme le contact d’un serpent. J’avais mal jugé des distances, et les points d’appui étaient beaucoup plus rares que je ne l’espérais. Deux fois je fis fausse route en inclinant sur la gauche. Il fallut revenir, à travers des difficultés incroyables. L’espérance m’abandonna souvent, mais non la volonté. Le pied me manqua : je pris une ombre pour une saillie, et je tombai de quinze ou vingt pieds de haut, collant mes mains et tout mon corps au flanc de la montagne, sans trouver où me retenir. Une racine de figuier me rattrapa par la manche de mon paletot : vous en voyez ici les marques. Un peu plus loin, un oiseau blotti dans un trou s’échappa si brusquement entre mes jambes, que la peur me fit presque tomber à la renverse. Je marchais des pieds et des mains, surtout des mains. J’avais les bras rompus, et j’entendais trembler tous les tendons comme les cordes d’une harpe. Mes ongles étaient si cruellement endoloris, que je ne les sentais plus. Peut-être aurais-je eu plus de force, si j’avais pu mesurer le chemin qui me restait à faire ; mais quand j’essayais de