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embarras, et offrit de me faire la courte échelle. Ce n’était pas précisément mon compte. Il fallut bien accepter ses services ; mais, en me hissant sur ses épaules, je le meurtris si outrageusement d’un coup de mes souliers ferrés, qu’il hurla de douleur et me laissa tomber à terre. Son camarade, qui s’intéressait au succès de l’entreprise, lui dit : « Attends ! Je vais monter à la place du milord, moi qui n’ai pas de clous à mes souliers. » Aussitôt dit que fait ; il s’élance, saisit la plante par la tige, la secoue, l’ébranle, l’arrache et pousse un cri. Je courais déjà, sans regarder en arrière. Leur stupéfaction me donna dix bonnes secondes d’avance. Mais ils ne perdirent pas de temps à s’accuser l’un l’autre, car bientôt j’entendis leurs pas qui me suivaient de loin. Je redoublai la vitesse : le chemin était beau, égal, uni, fait pour moi. Nous descendions une pente rapide. J’allais éperdument, les bras collés au corps, sans sentir les pierres qui roulaient sur mes talons, et sans regarder où je posais mes pieds. L’espace fuyait sous moi ; rochers et buissons semblaient courir en sens inverse aux deux côtés de la route ; j’étais léger, j’étais rapide, mon corps ne pesait rien : j’avais des ailes. Mais ce bruit de quatre pieds fatiguait mes oreilles. Tout à coup ils s’arrêtent, je n’entends plus rien. Seraient-ils las de me poursuivre ? Un petit nuage de poussière s’élève à dix pas devant moi. Un peu plus loin une tache blanche s’applique brusquement sur un rocher gris. Deux détonations retentissent en même temps.

Les brigands venaient de décharger leurs pistolets, j’avais essuyé le feu de l’ennemi et je courais toujours. La poursuite recommence :