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Anglaise assise à ma droite au fond d’une chaise de poste et passant son beau bras autour de mon long cou. Toutes ces suppositions flatteuses, qui auraient agité profondément une âme moins philosophe que la mienne, ne troublaient pas ma sérénité. Je n’éprouvais point les alternatives de crainte et d’espérance qui sont les symptômes caractéristiques de l’amour. Jamais, au grand jamais, je n’avais senti ces grandes convulsions du cœur dont il est question dans les romans. Donc je n’aimais pas Mary-Ann, j’étais un homme sans reproche, et je pouvais marcher la tête levée. Mais Mme Simons, qui n’avait pas lu dans ma pensée, était bien capable de se tromper sur la nature de mon dévouement. Qui sait si elle ne me soupçonnait pas d’être amoureux de sa fille ? si elle n’avait pas interprété dans un mauvais sens mon trouble et ma timidité ? si elle n’avait pas lâché ce mot mariage pour me forcer à me trahir ? Ma fierté se réveilla contre un soupçon si injuste, et je lui répondis d’une voix ferme, sans toutefois la regarder en face :

« Madame, si j’étais assez heureux pour vous tirer d’ici, je vous jure que cela ne serait pas pour épouser mademoiselle votre fille.

— Et pourquoi donc ? dit-elle d’un ton piqué. Est-ce que ma fille ne vaut pas qu’on l’épouse ? Je vous trouve plaisant, en vérité ! N’est-elle pas assez jolie ? ou assez riche ? ou d’une assez bonne famille ? L’ai-je mal élevée ? Et savez-vous quelque chose à dire contre elle ! Épouser Mlle Simons, mon petit monsieur, c’est un beau rêve ; et le plus difficile s’en contenterait.

— Hélas ! madame, répondis-je, vous m’avez bien mal compris. J’avoue que mademoiselle est