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moiselle sur mon bras gauche ; nous glissons ensemble jusqu’à cette crevasse, nous nous retenons à ces deux touffes d’herbe, nous gagnons ce figuier sauvage, nous nous reposons contre ce chêne vert, nous rampons le long de cette saillie jusqu’au groupe de rochers rouges, nous sautons dans le ravin, et nous sommes libres !

— Bien ! et moi ? »

Ce moi tomba sur mon enthousiasme comme un seau d’eau glacée. On ne s’avise pas de tout, et j’avais oublié le sauvetage de Mme Simons. De retourner la prendre, il n’y fallait pas songer. L’ascension était impossible sans échelle. La bonne dame s’aperçut de ma confusion. Elle me dit avec plus de pitié que de dépit : « Mon pauvre monsieur, vous voyez que les projets romanesques pêchent toujours par quelque endroit. Permettez-moi de m’en tenir à ma première idée et d’attendre la gendarmerie. Je suis Anglaise, et je me suis fait une vieille habitude de placer ma confiance dans la loi. D’ailleurs, je connais des gendarmes d’Athènes ; je les ai vus parader sur la place du palais. Ils sont beaux hommes et assez propres pour des Grecs. Ils ont de longues moustaches et des fusils à piston. Ce sont eux, ne vous en déplaise, qui nous tireront d’ici. »

Le Corfiote survint à propos pour me dispenser de répondre. Il amenait la femme de chambre de ces dames. C’était une Albanaise assez belle, malgré son nez camard. Deux brigands qui rôdaient dans la montagne l’avaient prise tout endimanchée, entre sa mère et son fiancé. Elle poussait des cris à fendre le marbre, mais on la consola bientôt en lui promettant de la relâcher sous quinze jours et de la payer. Elle prit son