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sique, en l’honneur de saint Antoine. On organise une procession pour fêter saint Antoine ; les petits garçons se déguisent en anges ; les hommes revêtent le camail de leurs confréries : voici les paysans du cœur de Jésus ; voilà ceux du nom de Marie ; voilà les âmes du purgatoire. La procession s’organise un peu confusément. On s’embrasse, on se culbute, on se bat, le tout en l’honneur de saint Antoine. Enfin, la statue sort de l’église : c’est une poupée de bois, avec des joues très rouges : Victoire ! Les pétards s’allument, les femmes pleurent de joie, les bambins crient à plein gosier : « Vive saint Antoine ! » Le soir, grand feu d’artifice : un ballon, modelé à l’image et ressemblance du saint, monte au-dessus de l’église et crève magnifiquement. Saint Antoine serait bien difficile, si un tel hommage ne lui allait pas droit au cœur. Et les plébéiens de la campagne me paraîtraient bien exigeants, si, après une fête si enivrante, ils se plaignaient de manquer de pain.

Passons les Apennins ; cela repose. Quoique la population ne soit pas suffisamment abritée par une chaîne de montagnes, vous trouverez dans les villes et dans les villages l’étoffe d’une magnifique nation. L’ignorance est toujours grande, le sang toujours chaud, la main toujours vive ; mais déjà les hommes raisonnent. Si l’ouvrier des villes n’est pas heureux, il devine pourquoi ; il cherche un remède, il prévoit, il épargne. Si le colon n’est pas bien riche, il étudie avec son propriétaire les moyens de s’enrichir. Partout la culture est en progrès, et bientôt elle n’aura plus de progrès à