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C’était un homme de quarante-cinq ans environ, vert, vigoureux, de belle barbe et de belle taille. Il nous offrit, au débotté, du tabac de sa récolte dans des chiboucks de sa façon. Puis, tandis que Garnier et Curzon ébauchaient une aquarelle de son église, il me fit les honneurs du jardin et de la maison. La maison était délabrée, et le jardin en bon état. « Voici nos ruches, me dit-il ; nous recueillons un miel dont tu me diras des nouvelles. Le miel de l’Hymette a le parfum du thym, le miel de Carysto sent la rose ; le nôtre le goût prononcé de la fleur d’oranger.

— Je suppose, lui dis-je, que le miel de vos abeilles ne fait pas tout votre revenu.

— Non ; nous avons deux moulins, quelques champs de blé, deux charrues : les paysans font marcher tout cela. Nos oliviers forment le plus clair de notre bien. Dans les bonnes années, nous vendons jusqu’à 10 000 oques d’huile (12 500 kilogrammes). Nous avons ici près quelques troupeaux : nos bergers vivent sous la tente. »

Pendant que nous visitions ensemble quelques ruines romaines voisines du couvent, les chiens des bergers vinrent à nous avec une intention marquée de tâter de notre peau. L’hégoumène, nonobstant sa dignité, ramassa des pierres et défendit son hôte.

Au bout d’un quart d’heure de conversation, il aborda la politique, et nous en eûmes pour longtemps. Il était abonné au Siècle, journal du parti russe, qui se publie à Athènes et qui, pendant dix ans, a semé l’intolérance en Grèce et la révolte en Turquie. Je n’eus pas de peine à voir que mon révérend ami était dévoué corps et âme à Nicolas, et qu’il