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merce, ancien caporal de la landwehr, ennemi déclaré de la Pologne et de toutes les nations qui ne sont pas les plus fortes. Son action la plus éclatante remontait à dix ans. Il avait dénoncé par lettre anonyme un membre du parlement de Francfort, réfugié à Dantzig.

Au moment où Meiser passait sous les tilleuls, son affaire était en bon chemin. Il avait recueilli cette douce assurance de la bouche même de ses protecteurs. Aussi courait-il légèrement vers la gare du chemin Nord-Est, sans autre bagage qu’un revolver dans la poche. Sa malle de veau noir avait pris les devants et l’attendait au bureau. Chemin faisant, il effleurait d’un coup d’œil rapide l’étalage des boutiques. Halte ! Il s’arrêta court devant un papetier et se frotta les yeux : remède souverain, dit-on, contre la berlue. Entre les portraits de Mme Sand et de M. Mérimée, qui sont les deux plus grands écrivains de la France, il avait aperçu, deviné, pressenti une figure bien connue.

« Assurément, dit-il, j’ai déjà vu cet homme-là, mais il était moins florissant. Est-ce que notre ancien pensionnaire serait revenu à la vie ? Impossible ! J’ai brûlé la recette de mon oncle, et l’on a perdu, grâce à moi, le secret de ressusciter les gens. Cependant la ressemblance est frappante. Ce portrait a-t-il été fait en 1813, du vivant de M. le colonel Fougas ? Non, puisque la photographie n’était