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corps inanimé ; elle le couvrit de caresses folles. Si les âmes pouvaient se partager en deux, elle eût ressuscité à ses frais sa chère Honorine. La rage succéda bientôt à la douleur. Le Tas ne douta pas un instant que le duc ne fût l’assassin. Elle rejeta le cadavre sur le lit et courut de toute sa masse sur M. de la Tour d’Embleuse. Elle le battit à tour de bras, lui mordit les mains, et chercha ses yeux pour les arracher. Mais le duc était insensible au mal physique. Il répondit à toutes ces violences par ce cri uniforme qui devait être désormais son seul langage. Les animaux ont des sons différents pour exprimer la joie ou la douleur ; mais l’homme atteint de folie paralytique gît au dernier degré de l’échelle des êtres. Le Tas se lassa de le battre avant qu’il se doutât qu’il était battu.

Cependant Germaine, belle et souriante comme le matin, éveillait sa mère et son mari, assistait à la toilette de son fils, et descendait au jardin pour respirer l’air embaumé de l’automne. M. Le Bris et M. Stevens ne tardèrent pas à les rejoindre. La brise de la mer caressait doucement les feuilles luisantes de rosée. Les belles oranges et les cédrats énormes se balançaient au bout des ramilles vertes ; les jujubes ridées et les pistaches sonores tombaient pêle-mêle au pied des arbres ; les olives tachaient de noir le feuillage clairet des oliviers ; les lourdes grappes de raisin jaune pendaient le long