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à tout ; il ne craignait rien au monde que de perdre son conducteur ou d’en être aperçu. Lorsque Mantoux doublait le pas, le duc courait derrière lui comme s’il avait eu des ailes ; quand le forçat retournait la tête, le duc se couchait sur le ventre, rampait dans les fossés ou se glissait sous une haie épineuse de cactus ou de grenadiers.

Il s’arrêta enfin à la lisière de l’enclos. Une voix secrète lui dit que la seule fenêtre qui brillait au rez-de-chaussée de la maison était celle de Mme Chermidy. Il vit son guide s’arrêter à la porte. Une femme vint ouvrir, et ce vieux cœur bondit d’une joie désordonnée en reconnaissant la créature qui l’attirait.

Elle n’était donc pas morte ! Il pourrait la voir, lui parler, et peut-être la rattacher à la vie ! Son premier mouvement fut de s’élancer sur elle, mais il se retint et se blottit. Il était sûr qu’elle ne se tuerait pas en présence du domestique. Il se promit d’attendre qu’elle fût seule pour tomber chez elle, la surprendre, l’étonner, et lui arracher le poignard de la main.

Il garda son affût durant une grande heure, sans s’apercevoir de la longueur du temps. Il aimait Mme Chermidy comme il n’avait aimé ni sa femme ni sa fille. Il sentait germer dans son cerveau des idées de dévouement, d’abnégation, de petits soins désintéressés, d’humble esclavage. Cet amour ab-