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Le forçat tressaillit, comme si ce vieillard pouvait lire dans sa conscience. Mais le duc avait déjà changé de note : il pleurait.

« Mon enfant, disait-il, je n’ai pas de secret pour toi. Il faut que je te fasse part du malheur qui nous menace. Honorine veut se tuer cette nuit, elle l’a dit au docteur ; elle a envoyé son testament à mon gendre. Ils prétendent qu’elle n’en fera rien et qu’elle a voulu nous faire peur ; mais je la connais mieux qu’eux tous. Elle se tuera certainement. Pourquoi ne se tuerait-elle pas ? Elle m’a bien tué, moi qui te parle ! As-tu remarqué ce grand couteau qui était sur sa cheminée à Paris ? Elle me l’a enfoncé dans le cœur un jour, je m’en souviens bien. C’est avec ce couteau-là qu’elle se frappera cette nuit, si je n’arrive pas à temps. Veux-tu me conduire chez elle. »

Mantoux protesta qu’il ne savait point l’adresse de la dame, mais il ne parvint pas à persuader le vieil insensé. Jusqu’à dix heures du soir, M. de La Tour d’Embleuse le suivit partout, au jardin, à l’office, à la cuisine, avec la patience d’un sauvage. « Tu auras beau faire, lui disait-il ; il faudra bien que tu ailles chez elle, et je t’y suivrai ! »

On se couche de bonne heure aux îles Ioniennes. À minuit toute la maison dormait, excepté le duc et Mantoux. Le forçat descendit à pas de loup sans faire craquer l’escalier disjoint qui conduisait à sa