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Germaine était seule au jardin avec le marquis de los Montes de Hierro. Tous ses hôtes venaient de prendre congé d’elle ; la comtesse et son fils reconduisaient Mme de Vitré ; le docteur était parti pour la ville avec les Dandolo et M. Delviniotis. La maison était livrée aux domestiques, et ils faisaient leur sieste, suivant l’usage, partout où le sommeil les avait surpris.

Mme Chermidy reconnut du premier coup d’œil la femme qu’elle avait aperçue une seule fois, et qu’elle ne s’attendait plus à revoir en ce monde. Si délibérée qu’elle fût, et quoique la nature lui eût fait don d’une âme bien trempée, elle recula d’un bon pas, comme un soldat qui voit sauter le pont qu’il allait traverser. Elle n’était pas femme à se bercer de chimères ; elle jugea sa position et courut tout d’un saut jusqu’aux dernières conséquences. Elle vit sa rivale guérie et bien guérie, son amant confisqué, son fils aux mains d’une autre et son avenir perdu. La chute fut d’autant plus rude, que la belle ambitieuse tombait de plus haut. Après avoir entassé montagne sur montagne jusqu’aux portes du ciel, les Titans de la fable ne sentirent pas plus durement le coup de foudre qui les aplatit.

La haine qu’elle nourrissait pour la jeune comtesse depuis le jour où elle avait commencé à la craindre s’éleva subitement à des proportions colossales, comme ces arbres de théâtre que le machi-