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ne l’avoir point rassasié de bonheur et tué de tendresse. « C’est ma faute, pensait-elle ; je l’ai accoutumé à se priver de moi. Si j’avais su le prendre, je serais devenue la nécessité de sa vie. Je n’aurais qu’à faire un signe : il quitterait sa femme, sa mère et tout. »

Elle se demanda souvent si l’absence ne lui faisait pas tort dans l’esprit de don Diego. Elle médita ce dicton vulgaire : « Loin des yeux, loin du cœur. » Elle songea à s’embarquer pour les îles Ioniennes, à tomber comme une bombe dans la maison de son amant et à le reprendre de haute lutte. Il suffirait d’un quart d’heure pour ranimer des feux mal éteints et renouer une habitude qui n’était encore qu’interrompue. Elle se voyait aux prises avec la vieille comtesse et Germaine ; elle les foudroyait de sa beauté, de son éloquence et de sa volonté. Elle prenait son fils dans ses bras, elle fuyait avec lui, et le sourire irrésistible de l’enfant entraînait le père. « Qui sait, se disait-elle, si une scène bien jouée ne tuerait pas la malade ? On voit des femmes bien portantes s’évanouir au spectacle. Un bon drame de ma façon la ferait peut-être évanouir pour toujours. »

Un sentiment plus humain, et partant moins vraisemblable, lui faisait regretter l’absence de son fils. Elle l’avait porté et mis au monde ; elle était sa mère après tout, et elle regrettait de s’en être dessaisie