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réjouis avec elles, je m’associe à leur bonheur, et je m’épanouis de compagnie. Comme la terre est belle ! comme tout ce qui vit est heureux ! et qu’il serait triste de quitter ce monde délicieux que Dieu a créé pour le plaisir de l’homme ! Il y a pourtant des gens qui se tuent eux-mêmes. Les fous !

On disait à Paris que je ne verrais pas pousser les feuilles. Je ne me serais pas consolée de mourir sitôt, sans avoir vu le printemps. Elles ont poussé, ces chères petites feuilles d’avril, et je suis encore là pour les voir. Je les touche, je les sens, je les broute, et je leur dis : « Me voici encore des vôtres. Peut-être me sera-t-il donné de voir l’été sous vos ombrages. Si nous devons tomber ensemble, ah ! restez longtemps sur ces beaux arbres, attachez-vous solidement à la branche, et vivez pour que je vive ! »

Y a-t-il rien de plus gai, de plus vivant, de plus divers que les pousses nouvelles ? Elles sont blanches aux peupliers et aux saules, rouges aux grenadiers, blondes comme mes cheveux à la cime des chênes verts, violettes au bout des branches du citronnier. De quelle couleur seront-elles dans six mois ? Ne pensons pas à cela. Les oiseaux font leurs nids dans les arbres ; la mer bleue chatouille doucement le sable de la rive ; le soleil généreux étale ses beaux rayons d’or sur mes pauvres mains pâles et amaigries ; je sens couler dans mes poumons un air doux