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GAËTANA.

LE COMTE, qui s’est rapproché.

Que dis-tu ?

BIRBONE.

Entre ces amoureux s’élève un obstacle… âgé de cinquante à soixante ans. Deux personnes habiles pourraient le contourner agréablement et se rejoindre en secret sans qu’il en eût la moindre nouvelle, mais l’ange ne connaît d’autre sentier que celui du devoir.

LE COMTE.

C’est vrai !…

BIRBONE, se retournant vers lui.

Ah ! votre seigneurie écoutait ma conversation ? Cela me réconcilie avec moi-même. Vous plaît-il me donner une minute d’audience ? (Il se lève.)

LE COMTE.

Parle.

BIRBONE.

Épouserez-vous madame Gaëtana si j’aplanis l’obstacle ?

LE COMTE.

Comment ?

BIRBONE.

Si je le fais disparaître si bien qu’il n’en reste plus aucune trace ?

LE COMTE.

Ah ça ! toi, quel métier fais-tu ?

BIRBONE.

J’en ai plusieurs, excellence. Ma mère était une pauvre fille ; mon père, un passant qui n’a pas dit son nom. J’ai été orphelin à quatre ans sous la tutelle de la police ; et comme les dents veulent du pain, j’ai mendié. Les bons Napolitains me donnaient plus de coups de pied que de gros sous ; j’ai donc appris à chercher l’aumône dans leurs poches. Mauvaise spéculation et pleine de dangers. Non-seulement j’attrapais par-ci, par-là, quelques journées de prison, mais un digne bourgeois, qui avait bien déjeuné quand j’étais à jeûn, surprit mon bras en flagrant délit et le cassa tout net. J’avais cru jusque-là que la vie des hommes