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ACTE PREMIER.

j’ai disposé de moi ; c’est chose faite. J’appartiens au baron del Grido, et ni Dieu ni les hommes ne me permettent d’en épouser un autre. Il arrive aujourd’hui : j’irai me jeter dans ses bras, et je suivrai mon devoir, qui est de l’aimer.

LE COMTE.

Gaëtana, vous êtes un monstre de coquetterie ou un trésor d’innocence !

GAËTANA.

Je suis, monsieur, un trésor d’amitié. Je vous aime de tout mon cœur ; mon mari vous aimera aussi, j’en suis sûre.

LE COMTE.

Votre mari ! (Il se lève.)

GAËTANA.

Mon mari est un excellent homme ; il vous recevra toujours avec plaisir. De votre côté, vous l’aimerez bientôt, et vous nous logerez tous les deux dans un petit coin de votre cœur.

LE COMTE.

Gaëtana, si vous étiez une femme comme les autres, j’aurais bien des choses à répondre ; mais je vous estime trop pour ne pas approuver tout ce que vous avez dit. Aimez le baron del Grido, c’est un honnête homme, Feu mon père, qui l’avait pratiqué, ne m’en a jamais dit que du bien. Vous serez heureuse avec lui ; je le désire, je l’espère. Mais dispensez-moi de le connaître et de lui serrer la main : mon courage n’irait pas jusque-là ; je suis un peu lâche, entre nous. J’aime mieux me faire tuer en soldat dans l’armée italienne que d’assister les bras croisés au bonheur de votre mari.

GAËTANA.

Et pourquoi ne seriez-vous pas heureux, vous aussi ? Il y a dans Naples bien des jeunes filles qui méritent d’être épousées, et vous avez le droit de choisir.

LE COMTE.

On ne choisit pas deux fois, vous l’avez dit vous-même. Je ne puis aimer que vous ; quiconque se met entre vous et moi, homme ou femme, je le hais.