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ACTE PREMIER.

« CAPRICANA[1].

« À d’autres ! Dans quel intérêt voulez-vous que notre bon vieux del Grido aille s’emprisonner ici avec sa femme ?

« MARTINOLI.

« Cher ami, dans quel intérêt un avare s’enferme-t-il avec ses écus ? C’est d’abord pour vérifier si le compte y est et si rien ne manque à la somme ; ensuite, pour s’assurer que le compte y sera toujours et que nul indiscret ne viendra partager sans permission. »

CAPRICANA.

Pourquoi ne dites-vous pas tout de suite que le baron est jaloux ?

MARTINOLI.

Parce que le mot ne serait peut-être pas assez fort.

CAPRICANA.

La jalousie ne va pas sans amour, et del Grido a plus de cinquante ans.

MARTINOLI.

C’est le bel âge pour aimer, parce que la rage s’en mêle.

CAPRICANA.

Ô magistrat ! tant pis !… Voulez-vous que je vous explique, moi, le caractère du baron, et son mariage, et toute sa conduite ? Del Grido est un homme fatigué. Les voyages en mer, le commerce, la banque, les affaires l’ont mis sur les dents. Le voilà deux ou trois fois millionnaire, et baron del Grido, de simple Poletti qu’il était. Bon ! il ne lui reste plus qu’à jouir de la vie, à recevoir, à donner des bals, à se faire honneur de sa fortune. Que fait-il ? Il était veuf depuis plus de quinze ans, il se remarie pour avoir une femme dans son salon. Il la prend au couvent, pauvre et de bonne famille, jeune et jolie par-dessus le marché. Le malade a bien le droit de choisir son infirmière. Mais amoureux, lui ? Jaloux, lui ?… Mon pauvre ami, vous me faites rire. N’est-il pas parti le jour même de son mariage, au sortir de la messe, pour un voyage de trois ou quatre mois ?

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