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LES ÉMOTIONS

porains. Peut-être la nature m’avait-elle créé pour cette riante destinée. C’est la lecture des romanciers qui m’a perdu.

Une jolie nouvelle de Charles de Bernard m’inspira la première idée. Quelques amis, quelques complices, si le mot vous paraît plus juste, m’aveuglèrent sur les dangers d’une telle action et me poussèrent en avant. Je travaillai plusieurs mois de ce travail assidu, obstiné, opiniâtre, qui trouve sa récompense, dit-on, et je finis par écrire cinq actes.

Je les portai à la Comédie-Française, et le comité de lecture, moins lettré, sans doute, que les brasseries du quartier latin, eut la faiblesse de les recevoir. On trouva là dedans quelques scènes hardies et nouvelles, et je persiste à croire aujourd’hui que ce drame aurait pu intéresser le public, si le public avait pu l’entendre.

Heureux l’auteur qui fait admettre une pièce au Théâtre-Français ! il est sur le chemin des honneurs et de la fortune. Qu’il soit habile, insinuant, protégé, bien en cour, il distancera tous ses rivaux en un rien de temps et s’emparera de l’affiche. Je fus mis en répétition au bout de quatorze mois ; on me répéta avec beaucoup de zèle et de talent. La pièce était admirablement montée : Geffroy, Got, Bressant, Monrose, Mirecourt et cet excellent Barré ; Mlle  Favart, ce camée antique, et Mlle  Riquer, ce pastel, de Latour ! Je retirai la pièce après deux mois de répétitions.

Mlle  Favart était tombée malade ; je ne voyais qu’elle ou Mlle  Thuillier dans le rôle de Gaëtana. D’ailleurs, l’été approchait ; la direction de la Comédie-Française, après m’avoir fait