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au-dessus du premier des citoyens, car il est quelque chose, et l’autre est simplement quelqu’un.

Les fonctionnaires petits et grands jouissent encore d’un avantage précieux : ils sont généralement irresponsables. Un ministre fait le bien ou le mal, à son choix, sans que la nation lui demande compte de ses actes ; un magistrat qui vous tient six mois sous les verrous par erreur ne vous doit pas même des excuses ; une femme appelée Doize, après avoir souffert injustement, a reçu des injures. Les fonctionnaires ecclésiastiques (car l’État se charge d’honorer Dieu pour ses sujets catholiques, protestants et juifs), les prêtres dis-je, parlent et agissent dans leurs fonctions, comme s’ils se sentaient irresponsables. Le médecin qui, par distraction, ordonnerait un gramme d’émétique au lieu d’un décigramme, tuerait son malade et ne devrait pas un sou d’indemnité à la famille, le malade fût-il un homme de cinq cent mille dollars.

Mais, direz-vous, cher maître, le médecin est donc un fonctionnaire dans ce vieux monde transatlantique ?

Les Français protestent que non ; il me semble que si, quoique le médecin ne prête serment à personne.

Dans la libre Amérique, le médecin est un commerçant, et il s’en fait gloire. Il achète un peu de science par son travail et quelques drogues pour