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res, emprunte rquelquefois les lunettes d’un simple provincial comme moi.

À cent lieues de Paris, nous conservons facilement le souvenir de l’ancienne vie parisienne, car elle s’est transportée chez nous peu à peu, avec ses bons et ses mauvais côtés, ses avantages et ses inconvénients.

Nos loyers de 1865 sont à peu près les mêmes que vous payiez il y a vingt ans ; le vin, la viande et toutes les denrées se vendent en province aux anciens prix de Paris ; l’élégance des femmes, le jeu et les autres plaisirs des hommes ont atteint le niveau parisien de 1840, sans le dépasser visiblement. Le bourgeois de Nancy ne ressemble pas mal au bourgeois de Paris dans les pièces de M. Scribe ; les vieux célibataires de Metz ou de Besançon semblent calqués sur les types de Béranger ; la jeunesse dorée de Marseille ou du Havre me représente assez exactement les héros parisiens de Balzac. Si la grisette rieuse et désintéressée, si l’artiste chevelu se trouvent encore en quelque lieu, c’est en province. Vous souvient-il de Bernardet, ce médecin de la Camaraderie, que Régnier représente avec tant de verve et d’esprit ? Il a quitté Paris depuis plus de vingt ans ; si vous voulez le voir, il faut courir à cent lieues.

Le but de Bernardet et de ses confrères du même temps était la clientèle. Avoir beaucoup de malades