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tour viendra de choisir un mari, on leur en fera faire un tout exprès.

Lorsqu’on énumère devant elles les cinquante ou soixante beaux noms qui s’entassaient la veille au soir dans les salons d’une fille, elles se demandent sans une répulsion trop marquée : Lequel de ces messieurs sera le père de mes enfants ? Quelle veuve ferai-je en allant à l’autel ? Sera-ce Tata, Coco ou Bichette ? Elles savent aussi qu’au bout d’un certain temps les pères de famille retournent à leurs vieux péchés et que le mariage moderne se réduit trop souvent aux proportions d’une simple lune de miel. Ces enseignements ne leur permettent plus d’envisager le vieil Hyménée avec cette terreur profonde et pourtant douce qui serrait le cœur de leurs mères. Interrogez une jeune fille un peu franche, elle vous dira : « D’abord, il faut être mariée, puisque le célibat est une prison pour la femme. Les bons maris sont rares, il est vrai, ou plutôt il n’y en a plus ; mais n’importe : que je sois seulement chez moi avec ou sans enfants, je trouverai le moyen de n’y pas mourir d’ennui. »

Quelques-unes, les plus braves, se promettent de lutter, de défendre leur bonheur, de se cramponner au mari, de se faire plus séduisantes que les coquines de l’autre monde. C’est la grande exception, et d’ailleurs cette fantaisie inutile ne survit guère à la première expérience. Lorsqu’une jeune fille